Résidence alternée des enfants. Regard d’une médiatrice familiale

Les derniers chiffres sur la résidence alternée des enfants en France datent de 2021. Voici une brève analyse de ce que l’on peut en retenir du point de vue de la médiation familiale.

Les chiffres publiés en 2021 par l’INSEE (1) ne tiennent compte que de la résidence alternée égalitaire, avec le même nombre de jours pour chaque parent. Nous ne citons ici que les points les plus significatifs.

En France, en 2020, 480 000 enfants mineurs vivent en résidence alternée et passent donc la moitié du temps chez chaque parent. Plus d’un enfant sur dix dont les parents sont séparés est en résidence alternée. Au domicile maternel, 73 % des enfants en résidence alternée vivent dans une famille monoparentale et 27 % dans une famille recomposée, respectivement 71 % et 29 % au domicile paternel.

La résidence alternée est la plus fréquente à l’âge de 10 ans

En 2020, parmi les quatre millions d’enfants mineurs dont les parents sont séparés, 11,5 % sont alternants (10,6 % en 2018). En moyenne, les enfants alternants sont âgés de 11 ans. Parmi les enfants ayant des parents séparés, le recours à la résidence alternée progresse régulièrement avec l’âge des enfants, jusqu’à 10 ans, où la proportion d’alternants atteint son maximum (15,2 %).

La résidence alternée est particulièrement rare chez les plus jeunes : seuls 4,2 % des enfants de moins de 4 ans ayant des parents séparés sont alternants. À ces âges, où les mères sont très impliquées dans la prise en charge des enfants, les parents privilégient la résidence chez la mère. Entre 6 et 14 ans, la part d’alternants reste toujours supérieure à la moyenne, mais après 10 ans, la part d’alternants décroît. Deux effets contribuent à cette baisse : les enfants les plus âgés appartiennent à des générations plus anciennes, pour lesquelles la résidence alternée est plus rare, et certains adolescents peuvent abandonner l’alternance mise en place durant leur enfance.

Quelle réalité en médiation ?

Ces statistiques, aussi intéressantes soient-elles, ne font pas la part entre résidence fixée par le juge et résidence résultant d’un accord entre les personnes ; elles ne mentionnent pas non plus si la résidence alternée est demandée par les deux parents ou imposée à l’un d’entre eux, ni le rôle qu’a pu y jouer la médiation familiale.

Pourtant la résidence fait souvent l’objet de conflits ou de discussions en médiation. Chaque parent a sa propre représentation de « ce qui se fait »… La parité peut sembler la seule solution envisageable si le conflit est fort, si les parents craignent de « perdre » leur enfant. De façon sous-jacente se pose le problème de la place de chacun et de sa reconnaissance. Une fois cette étape fondamentale passée, les parents quittent les « mathématiques » pour aller vers la réalité de leurs besoins.

La médiation peut apporter une réponse très ajustée et très nuancée à cette question de la résidence : les parents peuvent y faire du sur-mesure suivant leur domicile, leurs obligations professionnelles, leur façon de communiquer, l’âge des enfants. La fréquence une semaine / une semaine n’est pas toujours la solution la plus adaptée, les parents peuvent préférer 2 semaines / 2 semaines, ou des semaines partagées.

L’aménagement de la résidence par la parole

L’un des deux parents peut ne pas vouloir une alternance strictement égalitaire : tout est aménageable ! Si un enfant est très jeune ou si l’un des parents n’a pas vu l’enfant depuis longtemps, la progressivité dans l’hébergement par un parent est même fréquente. Accompagnés par les médiateurs, les parents peuvent déployer ensemble leur créativité afin d’aménager la résidence de leurs enfants.

Plus profondément, l’espace de paroles qu’offre le lieu de médiation permet aux parents de communiquer ensemble sur leur coparentalité, de s’adresser à l’autre avec respect, d’être entendus dans leurs besoins fondamentaux par les médiateurs et par l’autre parent. Les parents peuvent rédiger un protocole d’accord, qui pourra être homologué par le juge.

La médiation familiale est ainsi un espace particulièrement adapté aux questions de résidence. Elle offre un lieu confidentiel, impartial, où la parole peut se libérer en toute sécurité.

Nathalie Lebeau, médiatrice familiale

(1) Kilian Bloch, En 2020, 12 % des enfants dont les parents sont séparés vivent en résidence alternée, INSEE Première, n° 1841, 3 mars 2021.

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